The Gold Mapplethorpe
Pascal Lièvre recouvre les chairs avec de la paillette or, c’est à la fois un geste sculptural dans le sens où la photographie devient le socle sur lequel est collé la paillette, une sculpture plate, qui montre en masquant la chair la dimension sculpturale.
J’aimerai rajouter à mon texte de présentation, quelques mots sur le regard que je peux porter sur cette série de Mapplethorpe, A l’époque, je voulais montrer la dimension sculpturale des corps représentés, mais aussi le fait que Mapplethorpe photographie des corps noirs comme des statues (beaucoup de références à la statuaire classique blanche) plaçant alors le corps noir au centre de l’histoire de la photographie en en cassant les codes issus d’une modernité remise alors en question. Notamment comment la paillette en scintillant pourrait déconstruire les éclairages de la photographie.
En 2020, nous devons regarder le travail de Mapplethorpe aussi sur la manière dont un homme blanc « regarde » les corps noirs et de la façon dont la sexualité des hommes noirs y est perçue comme foncièrement différente, excessive ou autre. Peut-être alors le geste de recouvrir les corps de paillettes or pourrait être perçu comme un moyen aussi de souligner la fétichisation que Mapplethorpe fait du corps noir. Je n’oublie pas dans cette histoire, que je suis moi aussi un homme blanc, et qu’en recouvrant les corps noirs photographiés par Mapplethorpe, je souligne la dimension fétichiste du corps représenté et sa dimension sculpturale. J'ai fait plusieurs versions de la série avec des couleurs différentes, argent, or, cuivre, rose, mauve, etc… Les corps sont alors transformés en sculptures de toutes les couleurs.
En présentant les différentes versions ensemble, on multiplie les points de vue, en déconstruisant le dualisme noir & blanc des images initiales en variations chromatiques.
Cette fétichisation est notamment dénoncée par Glenn Ligon, artiste africain-américain gay, qui a réalisé Notes of the margin of the black book entre 1991 et 1993. Partant des photographies du Black Book de Mapplethorpe, il intègre des textes encadrés. Ces derniers vont de la critique acerbe à la reconnaissance envers le photographe. Ces écrits sont de la main de certains de ses modèles, ou d’observateurs et observatrices de son travail. Plusieurs modèles témoignent de la personnalité égocentrique de Mapplethorpe, de son obsession pour sa célébrité ou du sentiment d’avoir été utilisé sans reconnaissance. Ligon laisse l’interprétation ouverte puisqu’il ne semble pas prendre parti entre les deux camps.
Exposition MACVAL 2015.
2012 — .